Origines asiatiques du mandala


Origines indiennes


Parmi les objets les plus anciens ressemblant à des mandalas, il y a ces plaques votives retrouvées dans le nord de l’Inde, à Mathurâ. Dans les inscriptions elles sont nommées « ayagapattas ». Elles datent du IIè ou IIIè siècle après J.-C. Ces mandalas sont sans portes mais possèdent pour le reste toutes les caractéristiques des mandalas tibétains ultérieurs : un format circulaire contenant en son centre une image sacrée. L’image sacrée est entourée d’emblèmes et d’êtres célestes assortis. Dès le Vième siècle, les objets circulaires pour le culte et la méditation deviennent courants en Inde : ils offrent la même image cosmologique. On retrouve ces formes du mandala dans les temples de l’Inde.

Dans certaines régions de l'Inde du Sud, il existe une autre tradition du mandala. C'est la tradition du Kolam. Le mot Kolam signifie "manifestation", qu'elle soit gestuelle ou visuelle. Plus étroitement, le Kolam signifie un dessin symbolique, tracé le plus souvent à l'aube, par une femme. Il est dessiné à même le sol, sur la terre battue. Il est prière, et il évoque le monde créé et invoque la protection du foyer où il est placé. Soit il est dessiné sur le seuil de la maison, soit à l'intérieur. Dans ce dernier cas il est tracé dans la pièce-sanctuaire où veillent les petites divinités de bois, d'argile ou de métal. Les motifs évoquent des pétales de fleurs, des cercles, des losanges imbriqués, des lunes, des étoiles, des serpents noués ou d'autres choses encore. En temps normal les femmes prennent un mélange de poudre de riz séché et pilé et de poussière de marbre blanc et entre le pouce et l'index, comme pour saler un met, elles laissent glisser des lignes fines et régulières qui se changent en dessin géométrique complexe.


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Copie d'un Kolam dans un de mes cahiers...


Les jours de fête on ajoute des traits de couleurs au Kolam du jour, avec des poudres colorées, et des fleurs coupées peuvent également être déposées sur le dessin pour en parfaire l'esthétique. Si le Kolam reprend des motifs géométriques transmis de génération en génération, il peut aussi faire appel à l'inspiration du moment. Foulé aux pieds ou effacé par le vent, il rappelle en permanence la fragilité du monde et des choses...



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Réinterprétation d'un Kolam.



Il est communément admis que la tradition tibétaine du mandala, tant au Bhoutan, au Népal qu’au Tibet, provient de l’Inde. Des sanctuaires entiers, comme le monument de Borobudur à Java, sont construits sur un modèle de mandale en trois dimensions.


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Ci-dessus: dessin d’un mandala tibétain, 21ème siècle.

Origines chinoises


Dans les Musées royaux d’Art et d’Histoire à Bruxelles, nous trouvons des miroirs chinois en bronze très curieux. Ils datent du premier siècle après J.-C. Sur leur dos, ils présentent des symboles cosmiques se déployant en un décor très sophistiqué. Ils sont toujours ronds, à l’image du ciel dont ils captent la lumière cosmique.


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Dessin d’un miroir en forme de disque, dynastie Han, 1er siècle après J.-C., bronze,
diamètre 21 cm, Musées royaux d’Art et d’Histoire, Bruxelles. inv. L471


Ces miroirs étaient d’usage domestique ; une inscription sur l’un d’eux en témoigne. Entre les feuilles du motif central, il est écrit en caractères archaïques : « chang yi zi sun » qui signifie « que ce miroir soit utile à votre descendance pour l’éternité ». On a retrouvé quantité de ces miroirs dans des tombes antiques. Le bouton central possède une encoche à cordelière. Certains archéologues ont voulu voir dans les spirales du modèle repris par le dessin ci-dessus des « piliers du ciel », d’autres les huit périodes de l’année solaire chinoise.


La photo (ci-bas) de cette note montre un autre miroir de la même époque. Il est particulièrement curieux et a été récemment nettoyé. On a alors découvert que les contrastes de teintes ne sont pas dus à des différences d’alliages du bronze mais au traitement de sa surface. Sur ce miroir on voit clairement émerger la structure du mandala : cercle central avec ses émanations en forme de pétales, 8 cercles secondaires contenus dans un deuxième cercle, carré, portes en forme de T, et cercle extérieur à 5 bandes. Il suffit de comparer ce dessin à celui d’un mandala tibétain pour voir les similitudes. Bien sûr ici encore certains historiens, tenant à leur marotte, ont lu les T comme des « pics sacrés supportant le ciel ».


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Ci-dessus: photo d’un miroir en forme de disque, dynastie Han, 1er siècle après J.-C.,
bronze, diamètre 16,1 cm, Musées royaux d’Art et d’Histoire, Bruxelles. inv. L400.


« Des légendes chinoises mentionnent des « animaux dans le miroir ». Les dos de certains miroirs étaient utilisés comme mandalas pour la méditation et représentaient habituellement des animaux dans les quatre directions. Les directions sont vues comme des cycles du temps autour du temps immobile. Ces cycles de l’univers manifesté sont les multiples reflets du Un. De même que l’univers a été comparé à un miroir où Dieu se contemple, les miroirs sont faits à des fins de contemplation personnelle. Semblables à la lune reflétée, ce sont des portes par lesquelles les âmes peuvent passer. » ("La Spirale Mystique – Le voyage itinérant de l’âme", Jill Purce, Éditions du Chêne pour la traduction française)


Je crois que l’ancêtre le plus dépouillé du mandala, la forme la plus épurée, est le disque P’i. On est loin des mandalas tibétains complexes qui, paradoxalement, doivent nous aider au détachement du monde des formes…






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