Une œuvre censurée


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Sous les pavés la plage, œuvre anonyme.


L'être ailé me mène à l’œuvre, et me demande de la photographier. Aussitôt dit aussitôt fait.


Il me demande de la commenter ainsi :

" Sous les pavés la plage ", œuvre anonyme. 

C’est un subtil mélange de démesure décalée et de poésie subversive qui nous interpelle. La première lecture bascule pour laisser apparaître d’autres sens. L’artiste s’en prend au sol de manière radicale, dénonçant la sensation d’étouffement que peut provoquer en nous l’univers de la ville. Il a le courage de nous questionner sur la véritable relation entre le pavé et la rue.

L'artiste ose la transgression provocatrice de la rupture d’avec notre manière habituelle de concevoir l’utilisation du parallélépipède minéral dans l’espace urbain. Son œuvre nous oblige à réfléchir la relation entre le pavé solitaire pris dans son unité et le pavé noyé dans le groupe. L’artiste est particulièrement révolutionnaire dans le sens où en défonçant cette rue, il conteste le fascisme de l’ordonnancement des pavés dans une seule dimension, le plan. Le pavé peut enfin se libérer dans la tridimensionnalité...


Sous le coup de l'émotion je m'étouffe presque, et je me mets à tutoyer l'être ailé. J'ai la désagréable impression qu'on se connait déjà, mais que seul lui a les clés du souvenir de notre première rencontre.

-  Stop, stop!  lui dis-je. Arrête cet horrible verbiage de critique d’art endoctriné ! Et sous les pavés la plage, c’est un vieux truc de ‘68, tu ne crains pas que cela fasse ringard ? Le pouvoir ne laissera plus passer cela. Tout au plus risquera-t-on un pavé dans la figure ! Ce que tu me montres, c’est simplement le travail d’ouvriers qui repavent la rue ! 

-  Mais enfin tu n’as aucune imagination pour un artiste ! Tu as pourtant lu De Komst van Joachim Stiller de Hubert Lampo » me murmure la voix dans un souffle de vent, me tutoyant à son tour... « Tu en as même discuté avec l’écrivain ! Ils ont dépavé la rue pour la repaver sans rien y changer… et puis, tu y crois toi à l’avant-garde ? Tout ici est si délicieusement ringard ! On dépave et on repave les mêmes rues depuis presque 100 ans et tout le monde feint de ne pas le remarquer ! Peut-être devrait-on attendre le retour de Joachim Stiller ? 

Je lui réponds:

-  Je me demande si vous n’avez pas échangé vos noms, et si ce n’est pas toi l’ange contradicteur ? Une brise me caresse la joue et j’entends juste encore les mots 'à demain' posés comme un souffle dans mon oreille.






Concept de mes photos de nuit : me passer parfois de pied, prendre un objectif fixe très lumineux, mettre l’appareil à 1600 Iso, privilégier l’instant quitte à avoir certaines photos floues, j’adore cela car j’ai aussi beaucoup travaillé en Polaroid à une époque… 



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