9.5. La fin de la peinture ?
Archives 07/07/2015
Et si on prenait enfin un peu de recul ?
Aquilée (Frioul): église paléochrétienne avec baptistère, photo © Eric Itschert. |
Dans l’hexagone il existe une résistance de plus en plus appuyée contre les vieux caciques de l’art contemporain mondain indéboulonnables genre Buren-rayures ou Raynaud-pots-de-fleurs.
Le problème avec les Parisiens c’est qu’ils ne connaissent pas les opinions intermédiaires : on doit choisir soit pour un camp soit pour l’autre, sinon on est traité de traître des deux côtés. Or je me méfie des extrêmes. Parmi les « résistants », Jean Clair est tout aussi pathétique quand il décrète la fin de l’art (1), même si d'autres l'ont fait avant lui (2). C'est le phénomène bien connu de celui qui ne supporte pas que la vie continue sans lui. Tout ce petit monde nombriliste et dogmatique à souhait, de quelque bord qu'il soit, pense que cela se décide encore à Paris, le centre du monde...
Or, que ce soit en Asie ou en Afrique, on s'en fout qu’à Paris les uns aient décrété la fin de la peinture et les autres la fin de l’art. On en a vraiment rien à cirer! On vous emmerde!
En Belgique, moins dogmatiques, on s’est contenté de fermer temporairement notre musée d’art contemporain, Marcel Broodthaers peut enfin se reposer en paix. Chez nous ce qui est amusant avec le temporaire, c’est que cela dure. Admirez les échafaudages de notre Palais de Justice à Bruxelles qui sont là depuis tellement longtemps qu’on ne sait plus les retirer.
À Florence on continue à peindre et à sculpter.
La fin de la peinture, la mort de l’art, rien que ça ! Ils y vont fort les Parisiens. A quelques centaines de kilomètres de chez eux, à Florence, on continue patiemment à former des élèves en peinture et en sculpture. On vient du monde entier pour se former à Florence.
Il suffit d’une seule décision, individuelle, pour ressusciter la peinture et la beauté.
Il suffit d’une seule décision, individuelle, pour ressusciter la peinture et la beauté. La peinture est un terrain sans limites, hors du temps. Depuis l’art rupestre d’il y a plus de 39.000 ans (en Asie) jusqu’à la disparition de l’humanité, ce domaine infini sera toujours exploré, avec ou sans les Parisiens.
Si des sots et des fats déclarent la fin de la peinture, ils se trompent lourdement: aujourd’hui ce n’est pas la fin de la peinture qu’il faudrait annoncer, mais celle de notre civilisation et des sophismes mondains et mondialisés de l’art dit 'contemporain'.
Shiva danse...
D’Aquilée (Aquileia), la seconde ville la plus importante de l’Empire romain, il ne reste plus qu’un petit bourg depuis le passage d’Attila. Mais non loin de là s’est bâtie Venise, qui à son tour bientôt disparaîtra.
Détail d’une icône sortie de mon atelier. © Eric Itschert. |
Shiva danse, à chaque flamme un monde disparaît, à chaque son un monde naît. Tant pis si avec moi disparaîtront des savoirs secrets, faute de pouvoir les transmettre. Je suis optimiste. Je vois des jeunes artistes recommencer à zéro, tout simplement avec des pigments qu’ils fabriquent eux-mêmes et des liants qu’ils expérimentent. A Aubechies, lieu d’archéologie expérimentale belge, on a fait venir des sculpteurs africains pour retrouver les bons gestes autour de fours à l’antique. Les nouvelles générations retrouveront le chemin, qu’importe le temps pour y parvenir. Et dans une extase, elles épouseront la beauté et éprouveront à leur tour ce Présent infini...
Ils feront un avec Hachem/la Transcendance.
Je vous souhaite à tous, de partout, d’être libres, heureux et en bonne santé !
(1) In 'Fondation Agalma - Entretien avec Gérard Régnier (alias Jean Clair)'. Jean Clair nous avait habitués à mieux que cela (voir note (1) en bas de page)! Il part d'ailleurs de présupposés tout aussi contestables que ceux de ses contradicteurs...
(2) Citons pèle mêle : « La fin de l’art » texte dans Artpress en 1981, « La fin de la peinture », Müller en 1982, « La fin de l’histoire de l’art », Hans Belting en 1983, « La fin de l’art », Arthur Danto en 1984, qui réitère « Après la fin de l’art » en 1996, « La fin de l’histoire », Francis Fukuyama, « La fin des critères esthétiques », Yves Michaud, et last but not least, pour rire un coup : « La fin de la spéculation » par la presse, unanime, en 2008… (Merci à Laurent Danchin pour la bibliographie)
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