16.10. Le domaine de Circé

Début de l'histoire...




Circé


Quand je vis les deux garçons descendre du train je fus effrayé par la maigreur de Sven. Il avait les muscles sur les os. Il y avait aussi parfois une ombre de crainte dans ses yeux qui ne s'y trouvait pas auparavant. Il s'était passé une chose grave dans son école, et je saurais quoi. Les vêtements des garçons étaient propres mais très usés. Leurs yeux étaient cernés et leurs visages creusés. Mais ils semblaient très heureux et joyeux:

- On a réussi! On est sélectionnés pour l'année prochaine!

- La première chose à faire, c'est de téléphoner donner la bonne nouvelle à vos proches. Sven, pourquoi as-tu pris cet horrible train? Combien de fois dois-je encore te dire que tu as droit, comme nous, de disposer de la voiture et du chauffeur de la villa? Sven? Tu fais partie de la famille maintenant. Tu ne l'as pas encore compris? Sven!

- Je ne voulais pas déranger. Je ne suis pas habitué au luxe. Tu sais, j'ai toujours été élevé dans des conditions spartiates. Dans la Grande Maison j'avais juste une gouvernante. Je devais souvent me débrouiller tout seul. Oh, Circé, j'ai vu les ouvriers qui travaillaient à notre voie de chemin de fer. Il n'y a vraiment pas moyen de mieux les payer?

- Sven, tu es maintenant non seulement l'Enfant du Verseau, mais tu es aussi 'il leoncino'. Ton devoir est d'occuper ton rang avec classe et de te faire respecter. Je ne veux plus que tu utilises ce train. Au moins en prenant la voiture tu n'aurais pas vu les ouvriers.

- Cela  ne les empêcherait pas d'être toujours là. Pauvres gens. Je n'aime pas que tu m'appelles l'Enfant du Verseau, cela me rappelle la secte. Et comment sais-tu, pour 'il leoncino'? 

- Un coup de fil à Florence a suffi. Sven, tu es l'Enfant du Verseau, c'est une des rares choses pour laquelle le gourou avait raison. J'étais aussi au courant pour la venue de ton lieutenant. On vous a préparé deux chambres. Sven, il faut te remplumer! Morgane sera là dans deux semaines! Tu n'avais pas d'argent pour t'acheter des vêtements et pour améliorer ton ordinaire?

Sven examinait ses souliers, gêné. Fabio, lui, le regarda avec stupeur. Puis posa son bras sur l'épaule de Sven, comme pour le protéger. Alors je compris en un éclair. 

- Demain, vous me ferez le plaisir de m'accompagner à Florence pour vous renipper des pieds à la tête! Et avant la rentrée scolaire il faudra réassortir et renouveler votre matériel.

Fabio me dévisagea étonné, la bouche ouverte.

- Oui, toi aussi Fabio! Et ferme ta bouche. Sven mérite un second bien habillé! C'est moi qui offre, alors profitez-en!

- Oui Madame.

- Je ne suis pas Madame, j'ai un nom et je m'appelle Circé. Bien. Ce soir un délicieux repas vous attend, vous mangerez lentement car à mon avis vos estomacs ont rétréci. Ensuite un bon bain chaud tous les deux, vous l'avez bien mérité. Cela sera bien plus agréable que la douche à peine tiède de l'internat.

- Comment tu sais tout cela?

- Sven, je m'en veux terriblement de ne pas en avoir su plus...

- Mais Circé... tout s'est bien passé!

- Non tout ne s'est pas bien passé! On dirait que vous revenez de la guerre. Et il y a de la peur dans ton regard!

- Tu exagères!

- Ne crois plus échapper à ma vigilance, sale gosse! Et maintenant tu vas me faire plaisir de te laisser choyer.







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