16.27. Les jumeaux dépareillés

Début de l'histoire...


SECOND LIVRE
Les jumeaux dépareillés





Circé


Morgane et moi on a le temps de constater que le phénomène de la Chambre des Signes se répète chaque jour à la même heure. Le matin de leur séparation les adieux des deux jumeaux sont terriblement poignants. Morgane fait bonne figure. Je sais qu'elle pleurera tantôt dans le train, mais maintenant elle sourit et console Sven. Lui à chaque fois que quelqu'un qu'il aime le quitte c'est une véritable catastrophe. Il ne supporte pas. Alors concernant le départ de Morgane il est dans tous ses états. Elle est désolée pour le garçon, elle n'arrête pas de répéter: 

- C'est de ma faute. J'aurais dû t'écouter, Circé. C'est de ma faute.

Puis elle continue: 
- Sven, mon ange, arrête de sangloter! Je reviens dans deux semaines! Ce n'est quand-même pas la mer à boire! Tu sais, la frustration cela a aussi quelque-chose de bon. Tu fêteras mon retour avec d'autant plus d'enthousiasme et tu m'en aimeras d'autant plus fort! 

Enfin Sven parvient à se reprendre. Je vois qu'il fait un effort terrible, il lutte contre lui-même. Il fait un pâle sourire à Morgane:
- D'abord ce n'est pas de ta faute. Ensuite tu as raison: on s'est bien attendu depuis des années, alors attendre deux semaines cela doit être supportable, non? On s'écrit, hein?
- Juré! Promets-moi de ne pas hésiter à faire appel à Circé pour des massages?
- Promis!

Les deux amoureux ont très difficile de se séparer. Ils restent collés l'un contre l'autre. Morgane chuchote plein de mots doux dans l'oreille de Sven, et puis lui fait ses dernières recommandations. Alors ils sont obligés de se séparer, Morgane entre dans son wagon juste à temps, les portes se referment. De son compartiment elle envoie des bisous papillons à Sven, ils ne se quittent pas des yeux. Le train se met en marche, Sven court le long du quai et suit Morgane du regard. Mais le train prend de la vitesse, ensuite il disparaît petit à petit et prend la taille d'un jouet. Sven reste seul sur le quai, désemparé. Quoi de plus triste que ce jumeau qui se retrouve soudain dépareillé?

Il recommence à pleurer, tout doucement cette fois. J'en suis profondément malheureuse. Aussitôt revenu au palais il va se réfugier dans sa cachette. Ce matin je veux le laisser tranquille. Je le rejoindrai un peu avant midi.

Quand je vais le chercher il est étonné:
- Comment as-tu trouvé ma cachette?
- C'est Morgane qui me l'a révélée. Elle veut que je prenne soin de toi pendant son absence.

Le garçon esquisse un pâle sourire:
- Même quand elle était là tu prenais déjà soin de moi!

Je m'assieds près de lui et le prends dans mes bras. Je l'inonde de câlins. On reste un moment silencieux. Et puis je prends une profonde inspiration. Je me mets debout et lui tends la main:
- Il leoncino, Morgane voudrait que tu continues à profiter pleinement de tes congés. Elle m'a tant parlé de ta capacité incroyable de résilience... Relève-toi et viens avec moi! Je t'ai prévu un magnifique programme pour tes deux dernières semaines de vacances. Je voudrais que tu aies de belles choses à raconter dans tes lettres à Morgane. Ne crois-tu pas que si elle te sent heureux la vie sera beaucoup plus facile pour elle?
- Tu as raison... Et tantôt je n'ai pas assuré! Je peux lui téléphoner ce soir?
- Bien sûr! Et comme cela tu pourras aussi parler à ton père! Viens mon ange, la cloche va sonner!

On se dirige vers le palais, Sven ne me lâche plus la main...



Père apprivoise Sven




La collection de pierres dans le cabinet de curiosités...
Photos © Eric Itschert.


Cet après-midi père emmène Sven voir sa collection de pierres dans le cabinet des curiosités. Ils parlent des minéraux utilisés pour fabriquer des pigments, père en connait un bout et sait accrocher l'adolescent par des intérêts communs. Le soir c'est un vrai régal de les voir ensemble. Sven a désormais accepté de s'asseoir à la droite de père, et père est rayonnant! Ce dernier lui explique une de ses passions: l'astronomie. Leur discussion est animée. Père esquisse des mouvements de planètes dans l'air, il a pris des oranges et des figues dans une corbeille pour en représenter certaines, il s'est fait apporter une lampe de poche. Après le repas Sven va téléphoner. Ensuite père et lui vont dans le bureau de Sven, et père lui explique comment exploiter au mieux le télescope dont l'adolescent a hérité. Il lui montre l'emplacement des cartes du ciel, et où trouver les livres sur le sujet. Quand il est temps de dormir, Sven se rue dans les bras de père et le remercie. Il y reste longtemps, les yeux fermés. Père est très ému: il a enfin réussi à apprivoiser l'adolescent. Lui aussi finit par fermer les yeux. Sven chuchote encore un 'merci babbo' et puis va monter dans sa chambre, vanné. Père a fait exprès de le distraire le plus longtemps possible, il est particulièrement tard. Père me dit:

- Je crois que je viens de vivre une des plus belles journées de ma vie. Je suis tellement heureux.
- Père, le plus beau est encore à venir!
- Tu as raison, ma fille adorée. Mais l'adolescence est une période si courte entre l'enfance et l'âge adulte. Si je n'ai pas pu être présent durant l'enfance de mon fils bien-aimé, je compte au moins me rattraper durant son adolescence... Tu as tout organisé de main de maître! Non seulement tu es la meilleure régisseuse de domaines de tout le pays, mais tu es aussi de bon conseil en ce qui concerne les âmes...

Je rougis de plaisir, à mon tour je me cale un instant dans les bras de père. Il murmure juste un 'quel bonheur, vous trois', me souhaite la bonne nuit et monte se coucher.

Sven doit être prêt à dormir maintenant. J'irai moi-même lui porter son orange, je l'embrasserai et le prendrai un instant dans mes bras avant qu'il ne sombre dans ceux de Morphée. J'ai prévu une tisane pour le calmer et l'endormir...

Quand j'arrive je vois qu'il m'attend. Le voir humer l'orange et fermer les yeux, admirer son profil pendant qu'il mange son fruit avec délice, voir ses belles lèvres délicatement ourlées luisantes de jus me procure une joie intense. Ce garçon est en soi une vraie œuvre d'art.  Bientôt on pourra remplacer l'orange par une pomme, celles du domaine finissent de mûrir... Ensuite l'adolescent saute de son lit pour se laver les dents. 

- Ne pars pas, reste encore un peu près de moi...
Il se recouche entièrement nu, et se couvre juste d'un drap léger.
- Sven, tu vas attraper froid!
Je sors une couverture d'une armoire et la pose sur lui. Je l'embrasse. Sven baille puis me demande:
- Donne-moi ta main!

Prête à céder à tous ses caprices, je reste assise à côté de lui. Il a bu la tisane sans me poser de questions. Elle fait vite son effet. Ses yeux se ferment de fatigue. Il tient ma main et ne la lâche plus. J'attends que son souffle soit régulier pour enfin quitter sa main et fermer les dernières lumières de sa chambre avant d'aller me reposer.



Sven



Mon nouveau père adoptif est aux petits soins avec moi. J'apprends à apprécier son immense culture, sa droiture, son idéal, et sa tendresse aussi. Il me fait visiter le domaine, et partout il me présente comme son fils héritier. Circé veille personnellement à mon habillement dès je sors du palais: pour sortir avec père je porte des molières de cuir, des bas montant jusque sous les genoux, un short et une chemise tout blancs, une cravate bleue, un gilet, une ceinture et un canotier beiges. Je trouve que le short moule un peu trop mes fesses, Circé rit et rétorque: c'est parce-que tes fesses sont très rebondies, tu es trop mignon comme cela. Quand je rejoins mon père adoptif je vois qu'il porte les mêmes couleurs que moi, même si son habillement est différent.

Père me montre à quel point le domaine est autonome: concernant la nourriture nous sommes presque totalement autosuffisants à part quelques denrées comme les épices, le chocolat, le sel ou les poissons marins. Le surplus de notre production compense largement ce que nous devons acheter. Nous avons  des usines d'emballage et de conserverie de nos produits ainsi que nos marques protégées et nos propres magasins. Le grand-père de Circé a diminué la surface des vignobles afin de retrouver une agriculture plus diversifiée, indépendante de la spéculation. Nous avons nos propres sources et notre propre approvisionnement en eau. Nos énergies proviennent du bois renouvelable de nos forêts et d'une série incroyable de moulins à eau. Ces derniers nous procurent non seulement des forces motrices directes mais aussi de l'électricité grâce à une technologie de pointe. Une partie de  notre énergie provient également de la géothermie. On a enfin trouvé le moyen d'isoler et d'enterrer nos tuyaux  de manière efficace. Nous avons de moins en moins de tracteurs et presque pas de voitures, on est retourné à l'utilisation de chevaux et de bœufs. On tient absolument à pratiquer les principes de la décroissance. Nos rares camions et nos quelques voitures fonctionnent à l'hydrogène. Nous produisons notre hydrogène de manière propre, avec notre surplus d'électricité. Une partie de la forêt est laissée dans un état complètement sauvage, afin de favoriser la biodiversité. Quelques prairies sont laissées en jachère pour les mêmes raisons. Des troupeaux de moutons y paissent. Seule la ligne de Chemins de fer pose un problème. Notre motrice est bien trop vieille, elle consomme trop de diesel. Or, à part pour la durée de vie des quelques tracteurs rescapés et d'une voiture, on veut bannir toute utilisation d'énergies fossiles. Et c'est la galère pour trouver des pièces de rechange pour la locomotive. Certaines pièces doivent être entièrement refaites. Le palais favorise l'utilisation des Chemins de fer, le prix des billets et du transport des marchandises est dérisoirement bas. Ce secteur est à perte. En tout le budget reste heureusement largement bénéficiaire.



Un chemin de fer grandeur nature 



Un jour père m’entraîne plus loin dans ma passion des trains. Il connait mes points faibles et m'apprivoise habilement grâce à eux.
- Sven, j'ai réalisé un plan complet de modernisation de notre réseau. On va électrifier la ligne. Les tunnels sont suffisamment grands que pour pouvoir y faire passer des caténaires.

Je suis aux anges. Père m’entraîne dans son bureau et me montre tous les plans.

- C'est pour cette raison que des ouvriers sont déjà en train de travailler sur la ligne?
- Exactement! Tout est en route, on doit juste encore choisir la nouvelle motrice. On devrait aussi acheter deux fourgons supplémentaires et quatre wagons porte-containers. On réduira l'utilisation des camions à un seul par gare: ils feront le trajet entre le dépôt de la gare et la destination finale des biens transportés. Les autres domaines dépendant de la ligne sont d'accord avec notre projet. Les camions et les voitures étrangers aux domaines seront interdits dans toute la région, sauf autorisation spéciale. Mais si on veut bannir au maximum les voitures et les camions, on doit avoir un réseau de Chemins de fer très performant. Les politiciens ont trop facile de critiquer et de taxer sans fin l'usage de l'automobile, sans proposer des solutions alternatives efficientes.  

On passe une soirée à éplucher le choix qu'on a, père est étonné de mes connaissances dans le domaine, et de la pertinence de mes questions. On voudrait avoir une motrice puissante et économe à la fois, le choix se fera en modulant aux mieux ces critères. Le revêtement des toits de la locomotive et des wagons produira une partie de l'électricité du réseau. Père a déjà épluché plusieurs fois le cahier des charges des différentes motrices, mais mon avis l'intéresse. Il me propose ensuite de concevoir la nouvelle peinture des wagons et du train, heureusement j'aurai du temps avant de le faire. On sait aussi qu'on va devoir très vite acheter une deuxième locomotive pour pouvoir intensifier le trafic sur la ligne. Il faudra doubler les voies à toutes les gares pour permettre aux trains de se croiser.

Ensuite on passe à la question sociale: nos Chemins de fer étant déficitaires, le personnel et les ouvriers sont horriblement mal payés. Ils n'ont pas le même statut que les autres habitants du domaine. Heureusement ils sont très peu nombreux. Je bataille ferme avec père pour pouvoir améliorer leur statut et leur fournir à eux aussi une caisse maladie et invalidité potable, ainsi qu'une pension décente. Circé devra recalculer plusieurs fois les budgets. Elle devra aussi parlementer avec les autres domaines utilisant la ligne, même si cette dernière nous appartient à quatre-vingt-cinq pour cent...



Circé



C'est incroyable comment père retrouve sa jeunesse. Il est complètement tombé sous le charme de l'adolescent. Il a remarqué l'intérêt de Sven pour son projet de rénovation de notre ligne de Chemins de fer. La marotte de Sven, le bien-être des travailleurs, va certes nous coûter plus cher que prévu. Mais c'est faisable. Une fois la décision prise Père exploite aussitôt l'idée. Il fait convoquer tous les ouvriers et employés affectés à la ligne. Il leur annonce officiellement le projet de modernisation du réseau des Chemins de fer. Ils sont déjà au courant. Mais ensuite il leur présente son fils. Sven prend la parole et leur détaille nos décisions en ce qui concerne l'amélioration de leurs conditions de travail. Il le fait d'une voix résolue et chaleureuse, ce n'est plus l'enfant qui se fait cajoler au palais qui parle mais le meneur d'équipe devenu adulte. Il les rassure aussi: il n'y aura aucune perte d'emploi, un écolage est prévu pour les mécaniciens et les conducteurs. À long terme le palais des Salvati prévoit même d'embaucher. On entend quelques soupirs de soulagement. L'adolescent les fascine: comment un garçon si jeune peut-il déjà avoir un tel sens de la responsabilité et de l'équité? Sven termine son discours en soulignant l'admiration qu'il a pour eux: rien ne peut fonctionner dans nos domaines sans leur travail. Père prend le soin de rajouter qu'ils doivent ce plan social à son fils. La foule acclame l'adolescent, ils le portent en triomphe jusqu'à la table où un banquet est prévu. La beauté de Sven achève de les charmer, père sait que désormais ils se feraient couper en morceaux pour lui.

La nouvelle du nouveau plan social gagne très rapidement le palais et les environs. La popularité de Sven n'en devient que plus grande. Parfois père et Sven font le tour du domaine à cheval: ses talents de cavalier nous étaient inconnus jusque-là, il se débrouille très bien. Tout le monde salue joyeusement l'adolescent, des jeunes filles lui apportent timidement des petits cadeaux, des fleurs ou des fruits. Un gosse lui offre un jouet qu'il a fait lui-même, un petit cheval tressé avec de la paille.

Si le matin c'est père qui s'occupe de l'adolescent, les après-midi c'est moi qui le retrouve: je ne peux plus m'en passer. On nage, on se promène au jardin, on se raconte, je lui fais découvrir plein de livres de sa bibliothèque, on parle du domaine. La journée où Sven va rendre visite à Fabio est dure tant pour mon père que pour moi. On est effrayé du vide que son absence crée en nous.

Enfin il y a ces moments magiques qui m'émerveillent toujours: c'est quand, timidement, il me demande si je veux bien lui faire un massage. Parfois il me le demande au moment de la sieste, à d'autres moments c'est plus tard au bord de la piscine. Désormais il s'est parfaitement fait à l'idée de se laisser toucher le lingam par moi aussi. Aussitôt qu'il est tout nu au bord de la piscine je vois qu'il est retourné à l'état de faune et qu'il est très souvent en manque. Je me rends compte qu'il a besoin d'être régulièrement délivré de sa semence. Mes massages durent plus de deux heures. Je lui bande les yeux. Quand il est allongé tout nu devant moi je me rends compte à quel point j'en suis amoureuse. Il a de longs membres, ses muscles sont fins et son corps d'adolescent est merveilleusement bien proportionné. Son odeur me rend folle. Mes massages se font doux, je veux lui faire sentir tout l'amour que j'éprouve pour lui. Il  se laisse faire avec confiance. Quand je masse son dos et ses fesses, des fois il relève son bassin et je sais ce qu'il me demande. Il reçoit de longues caresses très précises et particulièrement douces mais ensuite je lui demande de se recoucher: il faut éviter une délivrance trop rapide. Il lui est déjà arrivé de me mouiller la main à ce moment-là. Une fois tourné sur le dos je passe beaucoup de temps à masser sa poitrine et son ventre. Des longs soupirs de bien-être récompensent mon habileté. Lorsque j'arrive à son lingam il commence à trembler de tous ses membres, se cabre, bouge convulsivement ses jambes et recroqueville par moments ses doigts de pieds. Je prends son lingam d'une main très légère et le caresse lentement, avec une infinie tendresse. Je connais tous les moyens pour faire reculer l'extase le plus tard possible, il en devient beaucoup plus intense et plus long. Je chuchote plein de mots tendres à l'oreille du garçon, je le complimente sans cesse sur sa beauté. Assister au magnifique et puissant geyser, entendre ses cris étonnés, c'est ma plus belle récompense. Et puis il y a ce soir où il enlève son bandeau, quand je débute le doux massage de son lingam. Mon visage est près du sien, j'adore le voir à ces moments-là. Il se relève, m’attrape par le cou et commence à m'embrasser sur la bouche, éperdu de reconnaissance. Il n’arrête plus de m'embrasser et de gémir à perdre haleine pendant que je continue à le caresser. Les fois suivantes je lui propose de ne plus mettre de bandeau, il accepte et cela me rend heureuse. Quand le massage est fini on se met debout et l'adolescent, le ventre trempé, me fait un grand câlin en me répétant sans cesse des 'merci' et en m'embrassant. On reste tout un moment collés l'un contre l'autre, j'adore. J'ai fatigué le garçon, cela supprime toute tentation d'aller plus loin. Je sais désormais que ce n'est plus qu'une question de temps, Lorenzo et moi on aura nos enfants tant désirés.

À la mi-septembre c'est les grandes retrouvailles, Morgane et Lorenzo sont de retour pour deux jours. Les nuits commencent à fraîchir. Je profite avec délices de ces derniers jours d'été passés avec Lorenzo et mes jumeaux adorés, les jumeaux sont encore plus beaux réunis. Tout est en place pour la rentrée scolaire de Sven, je peux maintenant me consacrer pleinement au début des vendanges et à la préparation de notre mariage. Lorenzo et moi on ne partira qu'une semaine en voyage de noces. Le domaine a besoin de moi. Père connaît la gestion du domaine, pourtant il compte faire appel à l'ancien régisseur pour le conseiller en cas d'imprévu. Trop de gens dépendent de nous. C'est alors que je reçois le premier bienfait du plan social concocté par père et Sven...



















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